De Pfaffenheim au Schauenberg

Aujourd’hui grand jour, ta rédactrice s’apprêtait à ressentir enfin un orgasme tellurique ! Rien que ça. Ne te mets pas dans cet état mon canard, je t’explique.

Au départ de Pfaffenheim, nous nous promenâmes au travers des vignes engourdies par le gel, nous humâmes l’air glacé et nous enfouîmes nos mains gantées au fond de nos poches. Bref on se caillait les miches et on se chauffait en bénissant la montée. C’était beau cela dit, le sol givré voire enneigé, le soleil, et une belle ambiance dans le groupe. On était treize, mais on n’allait quand même pas en refuser un pour être douze, ou embarquer un vigneron égaré pour nous retrouver à quatorze (encore que pour le vigneron…). Alors hop courage, on a évité de passer sous une échelle ou de croiser un chat noir, et ça a été.

Avant le plaisir tellurique, j’ai joui du panorama sur la Forêt-Noire avec le Belchen et le Feldberg. J’ai d’abord cru que les Allemands avaient tout déneigé, mais en fait non, il n’avait simplement pas neigé. Panorama complété par l’autre, encore plus fantastique, sur les Alpes Bernoises. La Jungfrau, le Mönch et l’Eiger, tout là-bas qu’on dirait une dentition de requin qu’aurait pas une bonne mutuelle pour la garder en bon état. Et au premier plan, nos vignes toujours aussi assoupies dans le givre.

Déjeuner à l’abri du Heiliger Baum à priori posé là en 2020. Aucun imbécile n’a encore eu le temps d’y graver dans le bois le fait qu’il se trouvait là à telle date. Pourvu que ça dure.

Et donc, nous voilà à grimper à la Table des Druides. Haut-lieu énergétique où déjà à l’époque devaient se dérouler des cérémonies. Un panneau indique qu’on ressent l’énergie devant et sur le rocher. Donc moi je me suis assise dessus, couchée même, prête à recevoir ces énergies. J’attendais un orgasme tellurique, une explosion atomique recommandée par le facteur Rhésus, une mise sur orbite voluptueuse, une révélation sensorielle, un bouleversement cellulaire ; je me voyais décoller dans une scintillance débridée, me transformer en un courant d’atomes surchauffés, genre ils ont fermé Fessenheim et ils ont ouvert Karina-Iris. De l’inédit, du spectaculaire, du transgressif, du puissant.

En pratique, je me suis gelé la zone australe sur le rocher, j’ai eu le pantalon trempé en convertissant le givre en eau, et je suis rentrée avec une cystite. Elle est belle l’énergie du haut-lieu, à mon avis les druides avaient déjà tout épuisé ! Heureusement je me suis réconfortée avec un chocolat chaud chez les sœurs de Saint-Joseph et Saint-Marc, à Notre-Dame du Schauenberg, lieu de pèlerinage depuis 1483, pour se souvenir de la guérison miraculeuse d’une princesse par un ermite (on ne sait pas comment il l’a guérie, je n’ose y penser).

Retour à Pfaffenheim par les vignes qui roupillaient toujours, et face à la Forêt-Noire qui comme d’habitude, était plutôt bleue dans la lumière déclinante de cette très belle journée hivernale. T’as vu cette belle phrase finale ?

Karina-Iris

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